Die Wies - Wallfahrtskirche zum Gegeisselten Heiland Gegeiselte Heiland


L'Eglise du Christ flagellé


Pourquoi cette église en plein pâturage?


En 1730, à
Steingaden, on préparait la procession du vendredi-saint. Tous ceux qui avaient un peu de talent mettaient de l'ordre dans ces fameux chars de procession qu'on allait promener à travers toute la ville. Deux personnages travaillaient avec un peu plus de fièvre que les autres: le révérend père Magnus Straub et le frère convers Lukas Schweiger. Les deux travaillaient à une belle image d'un Christ flagellé. Pour faire plus vrai on avait stuqué le bois et mis du cuir. Un peu de peinture rouge et, ici et là, quelques plaies bleues et vertes. Tellement vraie, l'image a quasiment fait scandale par son réalisme terrifiant lors de la procession du vendredi-saint 1730.


On a aussitôt demandé au frère convers de rentrer son Christ flagellé. Il pouvait le mettre où il voulait mais en tout cas ne pas le ressortir! Il l'a alors rangé au grenier de son meilleur ami Jérémias Reele, l'aubergiste du monastère.


La marraine de l'aubergiste qui habitait un peu plus loin à la campagne (à die Wies, composé de tout juste trois fermes...) vint un jour lui rendre visite. Comme elle s'ennuyait un peu dans cette auberge elle est montée dans les étages jusqu'au grenier. Là, elle a découvert le Christ flagellé et elle est tombé à genoux. Le soir avant de repartir Maria Lory
(elle s'appelait ainsi) a demandé à l'aubergiste de lui donner le Christ. Et elle est repartie avec son Christ sur un petit char en bois jusqu'à die Wies.


Jusqu'ici l'histoire est simplement anecdotique, mais elle devient plus importante puisqu'un jour, 8 ans plus tard, en 1738, un miracle s'est produit. Le 14 juin, Maria Lory, qui priait comme chaque jour devant son Christ, s'est rendu compte que le Christ pleurait. Les voisins alertés ont constaté qu'en effet le Christ pleurait. On alerta alors les voisins des voisins et les voisins des voisins des voisins et bientôt une foule entière de Steingaden même est venue voir le Christ de Maria Lory qui pleurait! Et tous les jours se sont organisées des processions. Naturellement le Christ fut déplacé dans l'église de die Wies. Malheureusement l'église n'était pas en mesure de recevoir plus qu'une quinzaine de personnes. Il a fallu que le chapitre de Steingaden prenne la décision de construire une nouvelle église. En 1743 l'abbé de Steingaden, Hyazinth Gassner, a choisi les metteurs en scène de cette image du Christ flagellé. Avec un goût tout bavarois il a choisi le meilleur architecte et le meilleur sculpteur: Dominikus Zimmermann et Anton Sturm
. Dominikus Zimmermann avait déjà fait ses preuves à travers toute la Bavière et arrivait à la fin de sa carrière. Ce fut pour lui une sorte de testament spirituel dans lequel il a donné le meilleur de lui même.

La première pierre de die Wies a été posée le 31 août 1746. La consécration solennelle a été faite le 2 septembre 1749, seulement trois ans plus tard! Grâce à Maria Lory et grâce à Zimmermann et Sturm nous trouvons au milieu de ce paysage bavarois l'admirable église die Wies, toute blanche et jaune-citron, à l'endroit même où jusqu'en 1746 il n'y avait qu'une toute petite église pour tout juste quinze personnes.


L'église
a l'étrange forme d'un rognon, pourrait-on dire. A l'intérieur, une partie ovale où sont reçus les fidèles avec à gauche une chaire et à droite une tribune de chantre.

 


Le maître-autel
est en profondeur. Il a été dessiné par Zimmermann et en grande partie conçu par Sturm. On y retrouve le Christ flagellé à qui l'on doit l'église. Dans l'église, formée d'un grand ovale largement ouvert, Zimmermann fait de partout jaillir la lumière et exorcise sans cesse l'ombre. C'est l'anti-baroque par excellence. Le baroque qui crée l'ombre pour mieux mettre à l'évidence le message de Dieu qui lui-même est la lumière. Le rococo exorcise l'ombre de façon à mieux faire jaillir, comme en stéréophonie, le message de Dieu.

De l'endroit d'où vient la lumière, part une série d'arcs soustendus (arcs et arcs en trompe-l'oeil, un jeu de volutes d'arcs amples et en creux) créant un délire formel des plus surprenants. Toutes les recettes que Zimmermann avait inventées au cours de sa carrière sont ici appliquées comme une sorte de testament ultime. Tous les volumes qui se prennent et se reprennent ici sans cesse, sont évidents aussi dans le décor. Dans les peintures, les sculptures et les bas-reliefs nous retrouvons ce jeu de pleins et de vides qui sont vraiment en perpetuum mobile.

La chaire représente la proue de l'esprit saint, l'une des grandes formules du rococo, ici entièrement traitée en bois et en stuc, par des artisans de Wessobrun, sur un dessin de Zimmermann. Le grand ange sur la partie centrale retient la tempête de ces conques et écumes de bois doré et argenté dans lesquelles semble se perdre les putti.


La tribune des chantres a aussi un décor ornemental ainsi que la tribune d'orgue
témoignant de l'importance que l'on accordait à la musique. Dominikus Zimmermann, dans le souci de créer une cohérence plastique en son église, est allé jusqu'à dessiner les bancs des fidèles. On y retrouve les même conques et les même rythmes que dans toute l'église. Aux quatre points cardinaux de l'église dominent quatre figures. Ce sont les pères de l'église qu'a sculpté Anton Sturm pour Dominikus Zimmermann. Chacune mesure 2,90 mètre de hauteur. Dans cette église, qui est déjà une église de la perpetuum mobile, ces quatre figures, au lieu de retenir l'église, lui donnent l'allure d'un vaisseau dont les voiles se gonflent. Die Wies c'est le vaisseau de la foi et les voiles de ce vaisseau ce sont les robes des quatre pères.


L'un des plus beaux est Saint Jérôme représenté avec le livre mais aussi avec le crâne de sa méditation. C'est le dernier qu'a sculpté Sturm et certainement le plus abouti.

 

 

 

 

 

Die Wies, perdue dans sa petite vallée, est comme le souffle exacerbé de la foi poussant le vaisseau de l'église!

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